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21 avril 2017

Le lait diafiltré à bas prix menace l’agriculture québécoise

Le débat enclenché par le président américain Donald Trump contre les producteurs de lait ontariens qui « osent » vendre leur lait diafiltré au même prix que les producteurs américains masque une réalité beaucoup plus inquiétante, selon l’Institut Jean-Garon : qu’il soit d’origine américaine ou canadienne, ce concentré de protéines laitières à bas prix qui entre dans la fabrication de fromages et de yogourts industriels menace la survie de nombreuses fermes laitières québécoises.

Selon Simon Bégin, porte-parole de l’Institut Jean-Garon et coauteur l’automne dernier d’un ouvrage sur la crise agricole générée par le lait diafiltré, ce produit est la plus grande menace qui existe pour la gestion de l’offre dans le lait, un système qui assure la stabilité des revenus des producteurs et des prix payés par les consommateurs dans un secteur qui est en crise partout sur la planète.

« Les propos de M. Trump sont inquiétants, mais la mollesse dont a fait preuve le gouvernement canadien jusqu’ici dans le dossier du lait diafiltré l’est encore plus », estime M. Bégin. Celui-ci rappelle qu’il y a déjà plus de deux ans que les producteurs de lait québécois dénoncent les importations massives de lait diafiltré américain, ce produit qui a la propriété étrange d’être considéré comme un concentré de protéines à la frontière, donc non taxable, puis de redevenir du lait une fois rendu aux usines laitières afin de contourner les limites sur la quantité de ces concentrés pouvant entrer dans les fromages et yogourts industriels.

« Le problème en est essentiellement un de prix : les Américains ont d’énormes surplus de lait et ils veulent l’écouler par tous les moyens, notamment en vendant leur lait diafiltré à des prix de dumping », a indiqué M. Bégin. L’Impact sur les revenus des agriculteurs a été majeur et plusieurs fermes laitières déjà fragiles ont été emportées.

Combattre le feu par le feu

Face à l’inaction du fédéral dans ce dossier qui pourrait facilement être réglé en appliquant les règles existantes, les producteurs de lait de l’Ontario ont décidé l’an dernier de combattre le feu par le feu et d’offrir aux grands transformateurs l’équivalent du lait diafiltré au prix du marché mondial extrêmement bas, ce qui contrevient à un des principes de la gestion de l’offre qui est de garantir aux producteurs des prix correspondant à leurs coûts de production.

« L’ironie est que le débat lancé par M. Trump risque d’amener le gouvernement fédéral à défendre le droit des producteurs canadiens à vendre leur lait aussi peu cher que les Américains, ce qui à terme menace plus efficacement la survie de milliers de fermes qu’une éventuelle renégociation de l’ALENA. »

Un débat nécessaire

L’Institut Jean-Garon, un organisme qui veut susciter des débats éclairés sur les grands enjeux agroalimentaires qui confrontent le Québec, estime que la gestion de l’offre doit faire l’objet d’un grand effort de recherche, de sensibilisation et de vulgarisation auprès des consommateurs, tellement le sujet est complexe et les positions pour ou contre antagonistes.

En effet, plusieurs questions sont actuellement sans réponse et mériteraient d’être explorées : l’accès à une matière première à bas prix que permet le lait diafiltré, qu’il soit américain ou canadien, se traduit-il par des économies pour les consommateurs et, si oui, dans quelle mesure? À qui appartiennent les usines laitières du Wisconsin à l’origine de la présente crise, sachant que de grandes firmes canadiennes possèdent plusieurs usines au sud de la frontière? Quelles seraient les conséquences d’un affaiblissement ou d’une disparition de la gestion de l’offre sur l’occupation du territoire rural québécois et les finances publiques forcées d’intervenir massivement pour atténuer les effets d’une telle crise? Quelle est la qualité du lait diafiltré entrant dans nos produits, sachant que l’usage d’hormones de croissance et d’une foule de médicaments interdits ici est permis dans l’industrie laitière américaine?

L’Institut Jean-Garon souhaite que le nouvel intérêt pour la crise laitière générée par le lait diafiltré ne soit pas que passager et que les gouvernements, les producteurs et l’industrie enclenchent une véritable « conversation nationale » sur cet enjeu majeur au bénéfice des consommateurs.

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