20 janvier 2017

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Philippe Ducros est un grand voyageur. Un voyageur qui est capable de voir la réalité en face. Il s'intéresse au mode de vie des gens. Il porte également le poids d'une responsabilité  qui vise à faire connaître à la population les réalités parfois extrêmement difficiles qu'il rencontre lorsqu'il est sur la route. « J'ai été invité au Kinshasa, j'ai poursuivi ma réflexion sur la responsabilité puis j'ai voulu exposer le rôle des compagnies minières canadiennes dans le conflit. »

Conflit le plus meurtrier depuis la Deuxième Guerre mondiale, la guerre en République démocratique du Congo a fait environ six millions de morts depuis une vingtaine d'années, puis engendré des milliers de viols par jour. « Les groupes armés financent leur guerre en vendant leur matière première à des compagnies minières internationales.  Des compagnies canadiennes sont impliquées dans cette problématique, puisque 70 % de l'industrie minière mondiale est basée au Canada. »

Désir de sensibiliser

Lorsqu'il est arrivé au Congo, Philippe Ducros a rencontré les gens directement atteints par cette guerre et a compris l'importance d'informer les gens de leur encouragement inconscient de ces horreurs. « J'ai rencontré les gens qui sont aux premières lignes de ce massacre, des femmes violées. Cette guerre, elle a pris de l'ampleur entre autres en raison du financement des compagnies minières. » À titre d'exemple, tous les appareils tels que cellulaires ou ordinateurs portables nécessitent du coltan, un minerai. 80 % de ce coltan vient de la République démocratique du Congo, ce qui veut dire que 4 téléphones sur 5 proviennent de ce conflit meurtrier. »

Espoir

Philippe Ducros a déjà élaboré la thématique du Congo dans toute sa douleur dans son spectacle « La porte du non-retour, » mais c'est plutôt en utilisant l'angle de la célébration et de l'humour qu'il présente « Bibish de Kinshasa. »

Le metteur en scène a clairement un désir de conscientiser et de sensibiliser les spectateurs à travers son œuvre. « On ne parle pas de ce conflit, et on ne parle pas de ces compagnies minières canadiennes. En tant qu'auteur, je n'aurais jamais écrit sur ce sujet avec humour, mais là ce sont les gens du Congo qui en parle, qui en quelque sorte ont quitté un pays qu'ils aimaient, même s'il n'était plus viable. »

« J'avais envie de continuer la réflexion et de parler des gens qui vivent là-bas. Parce que c'est tout de même un endroit très coloré, avec de la musique. Quand on vit au cœur de ce conflit, la vie prend une toute autre importance, vivre le moment présent est essentiel. Les gens vivent leur 24 h comme si c'était le dernier. Je voulais rendre hommage à ces gens. »

C'est dans une ambiance festive que Philippe Ducros invite les gens à plonger au cœur d'une réflexion. « J'essaie d'être un médium et d'en parler. C'est faux de dire qu'on est impuissant devamt une telle problématique, il faut plutôt découvrir quelle est notre puissance. Je crois que le théâtre a un impact et représente un peu un allumeur de bougie. Il faut d'abord informer les gens pour effectuer un travail de perception. Il faut changer les choses un pas à la fois, mais c'est possible. Au même titre que « L'erreur boréale » de Richard Desjardins a complètement changé les choses. Les problèmes s'appliquent ici au Québec, prenons l'exemple Pétrolia. Le gouvernement va dans le mauvais sens, il faut que les gens se mobilisent. »

Les trois Congolais présents sur scène présentent l'amour de leur coin de pays. Danses, mets congolais, qui seront d'ailleurs partagés avec le public et beaucoup d'humour seront au rendez-vous lors de cette œuvre pertinente à caractère social et politique. Malgré de lourdes conséquences,  les événements troublants sont présentés dans un contexte festif, rempli de chaleur humaine.