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16 mars 2020

Lettre ouverte d’une artiste à la ministre de la Culture, Nathalie Roy

Caroline Jacques

©Gracieuseté

L'artiste Caroline Jacques à l'oeuvre.

Bonjour Mme Roy, ministre de la Culture et des Communications.

La présente crise nous permet de réaliser à quel point la culture est une pierre angulaire de notre mode de vie. En fermant les rassemblements de 250 personnes et plus, on a réalisé à quel point la culture draine du monde. Nombre d’entre nous vivent le deuil de ne pas pouvoir voir le spectacle tant attendu. Imaginez comment peuvent se sentir ceux qui ont travaillé pour que le spectacle en question puisse avoir lieu.

En tant qu’artiste et travailleur autonome, je m’interroge. La semaine du 16 mars, je devais faire un gros projet de murale collective, dans le cadre du programme « Culture à l’école ». Hormis ce projet sporadique, nous étions en résidence de création, dans le cadre du programme « L'école accueille un artiste », pour fabriquer des décors pour une comédie musicale qui devrait avoir lieu en mai. Gervais Bergeron, mon acolyte et moi avons mis beaucoup de temps dans ce projet, pour la confection de ces décors, mais il en reste à mettre. Devrions-nous continuer à la maison ? On se demande ce qu’il adviendra des paiements qu’on attendait pour ces projets, si on ne fait pas les projets, la Commission scolaire nous payera-t-elle ?

Cette semaine, un journaliste a parlé de la situation précaire des travailleurs culturels, qui sont des travailleurs autonomes sans filet de sécurité. Pour la première fois,  je sentais que mon corps de métier était considéré. Que je n’étais pas la seule à la constater cette situation qui est le lot quotidien des artistes. La présente situation prouve que notre mode de vie ne tient qu'à un fil, que nous sommes des funambules, déambulant sur le fil du rasoir. Espérons que la crise que nous vivons en ce moment fera réaliser aux gouvernements que cette situation précaire doit changer. Que LA CULTURE, NOTRE CULTURE n'a pas à être compromise par le moindre coup de vent.  Il faut créer un filet de sécurité pour les travailleurs autonomes culturels ! Notre culture, est un bien collectif, ne mérite-t-elle pas plus de soutien, de considération ?

J’ai souvent l’impression que notre société érige sur le dos des artistes, des pyramides inversées. Grâce au travail, à la passion et à l’engagement des artistes, des festivals s’érigent, des salles de spectacle grouillent de monde, des boutiques de matériel d’art, des galeries poussent dans nos villes. Tout cela crée de l’emploi, fait rouler l’économie. Mais les artistes eux, n’ont que peu de revenus émanant de tout ce foisonnement de culture. Et surtout, s’ils ont un revenu, il sera sporadique. S’ils sont chanceux, ils auront une bonne année, s’ils ont un revenu substantiel, ils seront fortement imposés, alors qu’ils auraient des dettes à payer, accumulées par des années de vache maigre. Lorsqu’ils terminent un projet, ils doivent rapidement démarcher pour en trouver un autre. 

Je pense que nous réalisons  tous aujourd’hui, puisqu’on nous coupe l’accès aux événements culturels, que la culture est comme la couleur dans nos vies en teintes de gris. Les artistes se retrouvent en ce moment devant une triste réalité : des mois de travail et pas de représentation. Celles-ci seront sans doute remises, mais le revenu qu’ils devaient toucher, sera-t-il reporté ? Les artistes qui travaillaient depuis des mois, dans l’attente de cette consécration, de ce revenu, seront-ils payés ? Tout ce secteur se retrouve dans une situation précaire.

Au terme de cette crise, continuerons-nous à maintenir CEUX QUI FONT NOTRE CULTURE et notre culture, sur le respirateur artificiel ? Est-ce vraiment ce que nous souhaitons pour la culture québécoise ?

Et si mon propos ne vous convainc pas, fermez vos télévisions, brûlez vos livres, vos disques, les toiles, dessins, gravures, photographies qui enjolivent vos maisons. Et faites le deuil des spectacles dans des petites salles, parce que seulement les grosses structures vont survivre à cette crise. Maintenant, dites-moi en face que la Culture ne mérite pas plus de considération!

Caroline Jacques et Gervais Bergeron

Commentaires

16 mars 2020

Raphaël Rioux

Très intéressant! Effectivement je crois que la culture aurait besoin d'une structure lui permettant de s'épanouir sans être la proie facile de la culture internationale. Toutefois, ce n'est pas le seul secteur qui est dans cette position difficile puisque les agriculteurs vivent des problématiques semblables sur certain point. Eux aussi reçoivent un maigre revenu pour leurs produits dans la chaîne alimentaire. De nombreux agriculteurs vivent sous le seuil de la pauvreté et ne peuvent recevoir de support financier pour amortir le poids des dettes, ce qui entraîne un poids mental pour la continuité de leur entreprise. Donc, je crois qu'il y aurait un bel article qui pourrait être écrit sur les difficultés dans le volet agricole.

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